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Épervier d’Europe (Accipiter nisus)

L’Épervier d’Europe (Accipiter nisus) est une petite espèce d’oiseau de proie de la famille des accipitridés. Le mâle adulte a les parties supérieures gris bleuâtre et des parties inférieures barrées d’orange ; la femelle et le juvénile sont bruns au-dessus et barrés de brun au-dessous. La femelle est jusqu’à 25 % plus grande que le mâle, ce qui constitue l’une des plus grandes différences de taille entre les sexes parmi toutes les espèces d’oiseaux. Bien qu’il soit un prédateur spécialiste des oiseaux des bois, l’Épervier d’Europe peut être trouvé dans n’importe quel habitat et, dans les villes, chasse souvent les oiseaux de jardin. Les mâles prennent plutôt les petits oiseaux comme les mésanges, les fringillidés ou des passéridés alors que les femelles attrapent surtout des grives et des étourneaux, tout en étant capables de tuer des oiseaux pesant jusqu’à plus de 500 grammes.

Le comportement de chasse de l’Épervier d’Europe lui a valu d’être en conflit avec l’humain pendant des centaines d’années, en particulier avec les propriétaires de pigeons de course et les éleveurs de volaille ou de gibier à plumes. Il a également été mis en cause dans la diminution des populations de passereaux. Les recherches scientifiques n’ont pas établi de lien entre l’augmentation du nombre d’Éperviers d’Europe et les déclins de certains oiseaux des terres agricoles ou des bois après la Seconde Guerre mondiale ; les études des décès des pigeons de course montrent que les éperviers sont responsables de moins d’un pour cent des pertes. Les fauconniers utilisent l’Épervier d’Europe depuis le XVIe siècle au moins ; bien que l’espèce ait la réputation d’être difficile à entraîner, elle est également louée pour son courage. L’espèce est représentée dans la mythologie germanique et mentionnée dans les ouvrages de certains écrivains comme William Shakespeare, Alfred Tennyson et Ted Hughes.

L’Épervier d’Europe est un petit rapace avec de larges ailes arrondies et plutôt courtes et une longue queue, qui l’aident à se déplacer parmi les arbres. La queue est toujours plus longue que les ailes ne sont larges ; elle est striée de 4 à 5 barres, vagues chez le mâle adulte. Les pattes sont longues et jaunes et le tarse n’est pas plus large que le diamètre de l’œil. Les femelles peuvent être jusqu’à 25 % plus grandes que les mâles, et peser jusqu’à deux fois plus4. Ce « dimorphisme sexuel inversé » est inhabituel chez les vertébrés supérieurs, mais courant chez les rapaces, et plus marqué chez les oiseaux de proie ornithophages.

Le mâle adulte mesure de 29 à 34 cm de long, avec une envergure de 59-64 cm et une masse de 110 à 196 g. Il a les parties supérieures gris ardoise (tendant parfois vers le bleuâtre), avec le dessous finement barré de roux, qui peut sembler entièrement orange de loin ; ses iris sont orange-jaune ou rouge-orangé. La femelle est beaucoup plus grande avec 35-41 cm de longueur, une envergure de 67-80 cm et une masse de 185 à 342 g. Elle a les parties supérieures brun foncé ou gris-brun et les parties inférieures barrées de gris-brunâtre. Ses iris sont jaune vif à orange, généralement surmontés d’un sourcil pâle. La femelle est rarement (mais parfois) barrée de brun-roux, ressemblant alors aux mâles les moins roux. Le juvénile est brun chaud dessus, les couvertures des parties supérieures ayant des franges pâles, et il est grossièrement barré ou tacheté de brun en dessous, avec les yeux jaune pâle. Sa gorge présente des stries morcelées sombres.

Les parties inférieures pâles, contrastant avec les parties supérieures sombres, seraient une illustration de la loi de Thayer, en aidant à briser le contour de l’oiseau. La « contre-illumination » se retrouve chez les oiseaux de proie qui chassent les oiseaux et d’autres animaux se déplaçant rapidement. Les barres horizontales des adultes sont typiques des oiseaux prédateurs des bois, tandis que la couleur bleutée du mâle adulte est également observée chez d’autres rapaces ornithophages, comme le Faucon pèlerin (Falco peregrinus), le Faucon émerillon (F. columbarius) et d’autres espèces du genre Accipiter.

Le petit bec de l’Épervier d’Europe lui sert à plumer et traîner ses proies, plutôt qu’à les tuer ou les découper. Ses longues pattes et ses doigts sont adaptés à la capture et la consommation d’oiseaux. Le doigt externe est assez long et mince ; le doigt intérieur et les doigts arrières sont relativement courts et épais. Le doigt médian est très long et peut être utilisé pour saisir des objets, et la protubérance située sur la face inférieure de celui-ci permet à l’oiseau de fermer sa patte sans laisser de fente.

Son vol caractéristique, onduleux, alterne des battements d’ailes rapides et de courts vols planés en arc de cercle. En chasse, il vole au ras des arbres ou des buissons pour surprendre les passereaux.

C’est un oiseau généralement discret et silencieux en période d’hivernage. Lors de la période de reproduction, il « glapit » ou « tiraille ». Il émet principalement un caquètement constitué d’une série de syllabes simples comme kyukyukyukyukyu ou kikikikikikiki. Le rythme du cri varie selon qu’il est utilisé pour une parade, en cri d’alerte ou pour annoncer le retour au nid, bien que l’oiseau soit habituellement très discret aux abords de celui-ci. La femelle en couvaison utilise un « hui-ou plaintif » pour quémander de la nourriture au mâle.

Pendant la saison de reproduction, le mâle adulte perd un peu de poids tout en alimentant sa compagne avant qu’elle ne ponde des œufs, puis quand les jeunes sont gros et demandent davantage de nourriture. Le poids de la femelle adulte atteint un maximum en mai, pour la ponte, et un minimum en août lorsque le cycle de reproduction est terminé. Le nombre d’œufs et le succès reproducteur dépendent du maintien d’un poids élevé de la femelle. La plupart des Éperviers d’Europe restent sur leur territoire pour une seule saison de reproduction, d’autres gardent le même jusqu’à huit ans. Un changement de partenaire ou un échec de reproduction entraîne généralement un changement de territoire ; les oiseaux plus vieux ont tendance à rester sur le même domaine. Les oiseaux qui gardent les mêmes territoires connaissent un plus grand succès reproducteur, constant d’une année à l’autre. Les femelles qui se déplacent ont le plus de succès l’année qui suit le changement de territoire. En Europe centrale, tout comme l’Autour des palombes (Accipiter gentilis), l’Épervier d’Europe « neutralise » une zone autour de son nid où il ne chasse pas, dans laquelle nombre de petits oiseaux viennent nicher, protégés des prédateurs par la présence du couple de rapaces.

La femelle pond ses œufs fin mai ou en juin. Ils sont bleu clair avec de nombreuses mouchetures brunâtres ; les œufs récoltés, pour les collections de musée par exemple, perdent leur couleur de fond avec le temps. Chaque œuf mesure 35-46 × 28-35 mm et pèse environ 22,5 g, dont 8 % de coquille. La ponte compte de trois à six œufs, généralement quatre ou cinq. Ceux-ci sont généralement pondus dans la matinée, avec un intervalle de 2-3 jours entre chaque œuf. Si la ponte vient à être perdue, la femelle peut pondre jusqu’à deux œufs supplémentaires, alors plus petits que les œufs précédents. Lincubation est assurée par la femelle, le corps du mâle, plus petit, ne pouvant recouvrir la totalité de la ponte. Elle commence dès la ponte du deuxième ou troisième œuf. Chaque œuf éclot après 33 à 35 jours de couvaison, et la ponte échelonnée fait que la durée totale de couvaison dure pour la femelle de quatre à cinq semaines. Durant cette période, cette dernière est approvisionnée en nourriture par le mâle.

Selon le Congrès ornithologique international et Alan P. Peterson il existe sept sous-espèces :

  • A. n. nisus (Linnaeus, 1758), la sous-espèce type, vit de l’Europe jusqu’au Sud-Ouest de la Sibérie et en Asie centrale. Les populations du nord descendent vers le sud pour hiverner en Méditerranée, dans le Nord-Est de l’Afrique, en Arabie ou au Pakistan ;
  • A. n. nisosimilis (Tickell, 1833), vit dans le Nord-Ouest de la Sibérie jusque dans le Nord de la Chine et le Japon. Cette sous-espèce est totalement migratrice, passant l’hiver depuis le Pakistan et l’Inde, vers l’est à travers l’Asie du Sud-Est et le Sud de la Chine jusqu’à la Corée et au Japon. Certains individus atteignent même l’Afrique. Elle est très similaire à la sous-espèce type, mais légèrement plus grande ;
  • A. n. dementjevi Stepanyan, 1958, vit dans les monts Tian, en Asie centrale ; certains auteurs la considèrent synonyme de A. n. nisosimilis ;
  • A. n. melaschistos Hume, 1869, vit dans l’Est de l’Afghanistan jusqu’au Sud-Ouest de la Chine ; elle niche dans les montagnes d’Afghanistan et à travers l’Himalaya, dans le Sud du Tibet jusqu’à l’Ouest de la Chine, mais hiverne dans les plaines d’Asie du Sud. Elle est plus grosse que nisosimiliset a une plus longue queue. Elle a les parties supérieures ardoise et foncées, et des barres rousses plus distinctes sur les parties inférieures ;
  • A. n. wolterstorffi O. Kleinschmidt, 1901, vit en Corse et en Sardaigne. Cette sous-espèce est la plus petite de toutes, et a les parties supérieures plus sombres et le ventre plus fortement barré que la sous-espèce nominale ;
  • A. n. punicus Erlanger, 1897, vit dans le Nord-Ouest de l’Afrique. Grande et pâle, elle est très ressemblante à A. n. nisus ;
  • A. n. granti Sharpe, 1890 commémore le nom du collecteur du type, William Robert Ogilvie-Grant, et ne vit que sur l’île de Madère et aux Canaries. Elle est plus petite, plus sombre et présente davantage de stries longitudinales sur la poitrine que la sous-espèce type.